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Dispositifs : regarder, donner à voir

du 31 mars au 4 avril 2025
à l’école de Tarbes
Jardin Massey,
place Henri Borde, 65000 Tarbes

+33 (0)5 62 93 10 31
tarbes@esad-pyrenees.fr

Événement destiné aux 2e année art mention céramique disruptive, 4e année art mention art céramique

Un workshop proposé par Nicolas Tubéry

Durant le workshop nous travaillerons la création vidéo en s’appuyant sur la question du dispositif. Il sera question de penser le dispositif vidéo comme moyen de regarder, de filmer, d’organiser et de diffuser les images en mouvements. La semaine sera organisée en trois étapes qui nécessiteront chacune leur temps d’écriture et de réflexion : Le tournage, le montage et la projection. À partir de sujets que nous choisirons ensembles (qui peuvent être nourries par le travail des étudiants), nous mettrons en place des protocoles et inventerons des systèmes de tournage. Cela nous permettra d’expérimenter et de comparer différentes façon de placer la caméra. Nous travaillerons ensuite le montage des images et des sons enregistrés en envisageant une diffusion dans l’espace et sur plusieurs écrans simultanément. Nous conclurons ainsi la semaine en présentant une installation dans laquelle nous tenterons de ré-utiliser nos dispositifs de tournage comme des outils de diffusion.


Présentation

Le cadre se pose, la caméra balaye l’atmosphère d’un hangar, un sol de paille, les regards patients des bêtes : c’est l’enfant du pays qui observe. Les yeux grand ouverts, mais sans chercher à élucider, Nicolas Tubéry remonte par le détail au milieu d’où il vient. Une succession de plans serrés fait apparaître un monde paysan dont les cadences sont éternellement modelées sur celles de la vie. Hors d’époque, les rapports des hommes à leurs outils, à leur langue, à leurs rituels quotidiens ont constitué un patrimoine singulier, un univers laissé à distance de l’art depuis la fin du XXème siècle. C’est là pourtant que Nicolas Tubéry a découvert son vocabulaire de matières et de formes. Ses structures d’acier, ses pierres de sel, ses évocations d’un box ou d’une clède émanent tout droit de la ferme familiale, du labeur dans la campagne occitane où il a passé son enfance.

Dans ses films, il regarde le monde en sculpteur : observateur muet s’attachant aux gestuelles, guettant les lumières, inspectant les textures, cherchant dans les corps humains, animaux, mécaniques ou architecturaux la tension, l’événement intime, le rythme, les relations tacites. Avant de se plonger dans le milieu rural, il se penchait déjà sur les rituels quotidiens dans d’autres contextes sociaux. Ses réflexions ont mué, mais elles continuent de toucher à ce qui différencie la captation d’une réalité et la pleine restitution d’une situation.

Les relations complexes de dépendance entre hommes et bêtes, entre marchands et leurs marchandises paysages et habitants, sont faites d’accords tacites. Elles passent par des langages davantage physiques que rhétoriques. Face à ses propres sujets, Nicolas Tubéry recherche aussi une connivence qui est au-delà du langage. Sculpteur quand il observe, mais aussi quand il tient la caméra, il transforme les instruments agricoles en machinerie cinématographique. Il greffe ses outils aux outils, capable de façonner des mouvements de caméra à partir de barrières pivotantes ou un travelling sur un racleur hydraulique. En inventant des dispositifs de captation spécifiques aux lieux du tournage, le décor devient sujet, il devient technique. Nicolas Tubéry dédouble le travail agricole par l’ouvrage artistique et rejoue, au moment du tournage, une chorégraphie de l’effort.

Ce jeu de résonances entre le sujet du film et la méthode de sa captation se prolonge dans le moment de la diffusion, quand l’environnement de visionnage se met à évoquer, par bribes, l’ambiance du lieu filmé. Il se développe dans de monumentales installations dominées par le métal. Leur structure, des tubes d’acier ponctuées d’écrans de projection ou d’occultation, rappellent encore les barrières d’élevage. Modulables et éphémères, elles s’adaptent systématiquement au lieu où elles sont montrées.

La situation du tournage et celle de l’exposition est finalement la même pour Nicolas Tubéry : il s’agit de mettre en oeuvre les moyens de faire fusionner des regards étrangers – celui de la caméra ou celui des visiteurs – avec la scène qui se déroule devant eux. Faire naître les conditions pour que l’aspect sculptural d’un film et l’aspect cinématographique d’un objet dialoguent et se confondent.

Marilou Thiébault


Sculpteur et vidéaste, Nicolas Tubéry conjugue les deux pratiques dans ses oeuvres. Ses recherches récentes se concentrent sur le monde paysan d’où il vient : ses phénomènes atemporels, comme une foire aux chevaux, mais aussi plus conjoncturels comme les exploitations abandonnées par manque de repreneur. Quel que soit le sujet, il concentre son attention sur les gestes du travail, et sa fascination pour les détails est contagieuse. Observant tout en sculpteur, il adapte le matériel agricole en machinerie cinématographique, puis utilise les mêmes matériaux pour créer les structures monumentales dans lesquelles il projette ses films.
Il parvient, avec affection et justesse, à donner une place à la ruralité dans l’art contemporain.